[ACCI-CAVIE] Avec l’Afrique du Sud et l’Egypte, Djibouti, petit Etat de la Corne de l’Afrique, est l’un des pays du continent les plus connectés aux réseaux internationaux des câbles sous-marins dédiés à la connexion haut débit et aux services numériques. Son unique opérateur national, Djibouti Télécom, vient d’annoncer sa participation à la construction d’un neuvième câble sous-marin reliant Singapour en Asie du Sud-Est à la ville française de Marseille en passant par, entre autres points d’atterrissage, Djibouti.[1]
Pourtant ce potentiel n’est pas encore exploité à sa pleine mesure étant donné que le pays peine encore à faire bénéficier à ses citoyens et ses entreprises une connexion haut débit et bon marché, véritable catalyseur d’une transformation numérique réussie.
Dans le cadre de la « Vision 2035 », le pays s’est doté récemment d’un plan de développement quinquennal intitulé « Djibouti ICI » pour Inclusion, Connectivité et Institutions, qui sont les trois volets auxquels répond ce plan.[2]
En ce qui concerne la connectivité, le rapport constate que « l’économie numérique est encore faible. Malgré une connectivité régionale avec une multitude de câbles à fibres optiques sous-marins passant par Djibouti pour desservir la région, l’économie numérique de Djibouti reste faiblement développée avec un accès à la téléphonie mobile et à l’argent mobile limité. Le développement des services digitaux et du secteur entrepreneurial digital sont encore très faibles. »[3]
Pour pallier ces faiblesses, le défi est de taille. Dans son plan le pays ambitionne, pêle-mêle, d’ouvrir le marché des télécoms, mettre « sur pied un écosystème propice à l’innovation par la création d’un Technoparc dédié au numérique »[4] ou encore investir sur la formation du capital humain pour faciliter la création d’emploi dans le secteur.
Accompagné par les bailleurs de fonds traditionnels comme la Banque mondiale, qui vient d’accorder un financement à hauteur de 10 millions de dollars « pour accélérer la transformation numérique et construire une économie numérique plus inclusive »[5], Djibouti pourrait enfin trouver dans le numérique, l’avantage comparatif qui lui faisait défaut pour faire éclore des champions des services du numérique capables de rayonner dans la région et bien au-delà.
Pour ce faire, il faudra plus que la disponibilité des câbles sous-marins. Il faudra, en plus des initiatives prévues dans le plan, continuer le long et douloureux processus de réformes institutionnelles pour améliorer le climat des affaires, numériser les services de l’Etat, renforcer la sécurité juridique, rendre la fiscalité attractive et se faire le champion de l’intégration régionale en faisant la promotion non seulement du COMESA mais surtout de la nouvelle Zone de Libre Echange Continentale Africaine (ZLECA) pour qui le numérique constitue l’un des moyens les plus efficaces pour réduire les barrières non tarifaires.
D’autre pays, comme le Rwanda, ont eux aussi fait de la transformation numérique, un levier de leur développement et commencent à en récolter les fruits.[6] Cependant pour y arriver, beaucoup de sérieux et de persévérance, au-delà de la mode du moment, seront nécessaires pour en faire une réalité à Djibouti.
Waberi O. MOHAMED
Représentant résident du CAVIE à Djibouti
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[1] https://www.agenceecofin.com/infrastructures/2402-95342-djibouti-telecom-va-se-connecter-a-un-neuvieme-systeme-sous-marin-de-fibre-optique
[3] Plan National de développement (2020-2024), version française, page 42.
[4] Ibid., page 54 et suivantes
[5] http://www.adi.dj/index.php/site/Plus/9447
[6] Selon un rapport de la banque mondiale, plus de neuf million de citoyen rwandais reçoivent 96 services différents à travers la plateforme publique irembo.